Rififi Gardois
Un village peuplé d’irréductibles Gardois résiste à l’envahisseur : Nous aurions pu commencer à écrire ce reportage, un peu à la manière de René Goscinny et de son complice Albert Uderzo, les papas d’Astérix ” Un village peuplé d’irréductibles Gaulois résiste encore et toujours à l’envahisseur “, sauf que dans notre histoire animée de 2012, les gaulois en question ne sont pas bretons, mais Gardois. Et que cela concerne cinq villages qui résistent à l’envahisseur …un rififi gardois digne d’une BD.
Mais qui est l’envahisseur cette fois ci ? Non ! Pas Jules César, ni David Vincent, mais une société. La société Guintoli, filiale du 4ème groupe français de travaux publics.
Cinq villages se mobilisent
Que se passe t il dans le Nord-Est du Gard pour mobiliser 5 villages et l’ensemble de la population des alentours ?
Du Rififi ? Bien loin de l’histoire d’Astérix et de la conquète de la Gaule par Jules, le terme de conquérant est le terme utilisé à St Marcel de Careiret, pour souligner une société marseillaise de travaux publics qui cherche à s’implanter dans le Gard. D’où ce titre à la façon de Michel Audiar, du rififi dans le Gard. Parce qu’il va y en avoir du rififi, dans les cinq villages concernés (m’a t-on dit hors caméra)
Rappel des faits
La société Guintoli, filiale du 4ème groupe français de travaux publics, basée à St-Etienne-du-Grès dans le département des Bouches du Rhône, désire implanter dans le nord est du Gard, près de Bagnols sur Cèze, une carrière d’extraction de calcaire sur les actuels Bois de Saint-Laurent la Vernède, ceci au milieu de cinq autres villages, Saint-Marcel de Careiret, Cavillargues, La Bastide d’Engras, Verfeuil et Pougnadoresse.
Si certains maires sur les cinq communes précitées (comme Monsieur Christian Bonnet du village de Saint Marcel de Careiret) ont d’ores et déjà donné leurs avals à cette société, la population n’est pas de cet avis et entend bien combattre cette décision. Le projet, validé par une délibération du conseil municipal, voté à l’unanimité le 26 mai 2010, divise les esprits et mobilise plusieurs associations de défense de l’environnement.
Les opposants au projet, se sont réunis le 24 novembre 2012 à Saint Marcel de Careiret sous la houlette de Alain Bruguier, président de l’Association de Défense des Vallées de la Tave et de la Veyre (ADVTV). Ce dernier explique aux habitants venus nombreux l’écouter, les tenants et les aboutissants de ce projet de carrière avec les causes et les nuisances qui en découleront.
Nuisances … vous avez dit nuisances ?
Les nuisances engendrées par cette carrière : les besoins en eau en été (car les villages en question sont déjà en pénurie d’eau pendant cette saison), les tirs de mine, la poussière, l’érosion des sols, les risques de pollution des cours d’eau, les dévaluation des biens immobiliers, et la perte de qualité de vie pour les villages des alentours, mais aussi pour le monastère de Solan à La Bastide d’Engras, classé en zone Natura 2000. La nature ne sera pas épargnée, des lieux de nidifications de rapaces rares seront perturbés, avec une pollution sonore accrue, une noria de camions passant sur les routes, soit un camion toutes les deux minutes, avec les risques de pollution, de bruits et de risques d’accidents de la route.
Distillant ses informations de façon précise, Alain Bruguier a démontré les impacts négatifs que pouvaient engendrer l’implantation de cette carrière. Il cite aussi les avantages économiques, selon les chiffres donnés par la société Guintoli. A savoir 8 emplois, avec pour conséquence, la fermeture d’autres carrières à proximité déjà présentes dans la région, donc une perte d’emploi pour les salariés concernés, environ 130 emplois situés à Verfeuil, 40 à Vallerargues, 20 à Fontarèches pour un total de 190 emplois VRD (Voirie, Réseau, Divers), soit 95% d’emplois menacés dans un contexte actuel difficile.
Coup de théâtre
Deux jours après cette réunion, lundi 26 Novembre 2012, le conseil municipal de St-Marcel dûment convoqué, doit se prononcer pour ce projet de carrière. Christian Bonnet, le maire de ce village, ouvrant la séance, précise en préambule que le vendredi 23 novembre, a été déposée, au secrétariat de mairie, une pétition d’opposition à ce projet, comportant 508 signatures d’habitants de Saint-Marcel, soit 80 % de la population.
Les 13 membres du conseil municipal étaient présents et ont voté à bulletin secret. Le résultat est sans appel : 11 voix contre le projet de carrière et 2 voix pour. Un sérieux camouflet pour le Maire qui était pour ce projet. L’ambiance qui en découle est détestable désormais dans les villages, nous confiait il y a quelques jours , Alain Bruguier, m’expliquant que l’on fait tout dans certaines mairies pour que les réunions d’informations avortent.
Un pas, j’avance, deux pas, tu recules … Une nouvelle danse est à l’honneur dans les services de mairies, mais pas si facile de la danser pour les opposants à la carrière, quand ces derniers demandent quelque chose aux services des mairies.
Une demande de prêt de salle des fêtes à été demandé à la mairie de Verfeuil, accordé, puis refusé …
Alors que les six réunions d’informations organisées jusqu’ici, l’ont été dans des salles mises à disposition gracieusement dans les autres villages, sans contrainte d’aucune sorte, la mairie de Verfeuil traîne les pieds, invoquant après acceptation, que l’usage de cette salle est (depuis) réservé exclusivement aux habitants ou aux associations de la commune, donc impossible de louer. Puis par la location d’un habitant de la commune (membre de l’Association de Défense), la mairie accepte, puis refuse, puis accepte de nouveau, mais accessible après avoir payer 90 euros, puis refuse, car pas d’assurance (70 euros) … (“on croit rêver” dixit Alain Bruguier )… et là, les Gardois présents commencent à être en colère.
Elections
Nous pensons que les prochaines élections municipales seront sans appel pour celles et ceux qui sont actuellement en place, me confiait à la sortie de la réunion une habitante de Verfeuil, très en colère d’avoir appris cette manoeuvre de bas étage et ce sera une déculotté électorale pour les municipales, me rajouta t-elle en souriant.
Deux enquêtes par un Commissaire-Enquêteur
1200 Messages électroniques sont parvenus au secrétariat de Mairie de Saint Laurent, à l’attention de Mr Jean-Louis Blanc, commissaire enquêteur. Car il y a eu une enquête publique … même deux. La première enquête publique concernait le défrichage des bois, la seconde concerne l’exploitation de la carrière.
Pour cette dernière, vu le nombre d’opposants, trois registres d’enquête ont été nécessaires pour recueillir les contributions des opposants.
NDLR : Qu’est ce qu’un commissaire enquêteur ?
Le commissaire enquêteur est une personne désignée par le tribunal administratif, issue d’une liste de commissaires enquêteurs agréés par le préfet du département pour les enquêtes liées au code de l’environnement ou préalables à une déclaration d’utilité publique, ceci lui confère une indépendance face aux pouvoirs publics et aux intérêts privés. Le commissaire enquêteur a donc communiqué son rapport le vendredi 7 Décembre 2012, sur l’enquête concernant la demande de défrichement sur le futur site de la carrière avec un avis favorable au défrichement.
Bizarre, vous avez dit Bizarre !
Alors que l’enquête a commencé le 5 novembre 2012 et devait se terminer le 5 décembre 2012 (donc un mois d’enquête), le rapport (avec ” Avis favorable à la demande de défrichement “) a été accordé le 29 novembre 2012, soit 6 jours avant la date légale de fin ? et donc en avance …?
Il est clair que certaines questions fusent désormais sur cette enquête.
Nul doute que ce projet de carrière alimente les conversations locales et environnantes et que les habitants concernés vont passer des fêtes de fin d’années tranquilles. Mais pour combien de temps ?
Il suffit de se rappeler comment les Gardois et les Ardèchois se sont mobilisés contre les gaz de schistes pour comprendre que bientôt, le combat va vraiment commencer, avec comme arbitre le Préfet du Gard, qui prendra une décision au regard des rapports du commissaire-enquêteur. A savoir qu’une demande de rendez-vous auprès de la préfecture sera effectuée en janvier 2013 par l’association ADVTV et son président.
Avec comme résultat, une (future) réunion autour d’une table avec le Préfet du Gard, la Dreal et bien sur, de nombreux maires et habitants des villages hostiles à cette carrière. Cette réunion restant à la seule décision du Préfet. Est ce que la société Guintoli sera présente à cette réunion …? Mystère ! Certes, l’enjeu n’est pas aussi médiatisé que la lutte des opposants aux gaz de schistes, mais ce n’est que le début, car l’esprit des camisards est omniprésent.
Droit de réponse
Sans prendre parti et apportant l’information à sa juste valeur, Tv Languedoc laisse un droit de réponse à ceux qui n’ont pu être interviewé.
A savoir, les maires de communes concernées, mais également les représentants de la société Guintoli, et de pouvoir s’exprimer devant nos caméras pour répondre à nos questions, sur un terrain neutre et non miné naturellement !
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