Après sa déroute électorale aux élections européennes, la droite est à la croisée des chemins. Jamais, sous la Cinquième République, sa position n’avait été aussi fragile, et son avenir aussi incertain. La droite française se trouve confrontée à une véritable crise existentielle. Sa survie est en jeu.
Clarifications nécessaires
Depuis sa déroute aux élections européennes, le positionnement de la droite, coincée entre La République En Marche et le R.N, est devenu très problématique sur l’échiquier politique. Aussi, avant de se lancer dans une stratégie de reconquête, est-elle dans l’obligation d’opérer auparavant les clarifications nécessaires afin de ne pas partir à l’aveuglette sur le chemin du renouveau – à supposer que ce dernier advienne.
Quels sont les points sur lesquels la lumière doit être faite ? En fait, la droite est appelée à se redéfinir à trois niveaux : celui des idées, celui de son électorat, et enfin celui de ses alliances.
Quelles idées pour quel électorat ?
Au niveau des idées, nul n’ignore que deux courants principaux coexistent chez Les Républicains : l’un incarné par Valérie Pécresse et Xavier Bertrand, tourné vers les centristes, et que peu de différences séparent du macronisme. Le second courant est porté par des personnalités comme F-X Bellamy, Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau. Ce courant est plus souverainiste, et davantage sensible aux questions sociétales (comme la PMA).
Qui arbitrera entre ces deux sensibilités ? A long terme, le schisme est-il inévitable ? Il est toujours loisible à la droite de rejouer le scénario des alliances électorales entre le RPR et l’UDF de jadis. Seul hic : à l’époque, un parti tiers n’avait pas préempté toute la frange centriste de l’UDF, comme le parti LREM l’a fait depuis l’élection d’Emmanuel Macron. De plus, l’extrême-droite n’était pas, à l’époque de Chirac et Giscard, le premier parti de France ! Les temps ont changé. Cette situation poussera-t-elle la droite à éviter le schisme à tout prix ? Le bon sens le voudrait.
Au niveau de l’électorat, les lignes ont considérablement bougé aussi. Le temps est loin où une droite « bonapartiste » pouvait espérer, avec Sarkozy, obtenir les suffrages des couches populaires. Celles-ci, en ce qui concerne la droite, ont rallié en masse le R.N. De l’autre côte du spectre sociologique, les classes aisées ont rejoint Macron, de même que les retraités. Dans ce contexte, où se situent les réservoirs de voix de la droite ? Il semblerait que là aussi, le salut ne puisse venir, sinon d’un échec du macronisme, du moins d’une lassitude à son endroit. Mais cette éventualité est trop aléatoire pour tenir lieu de stratégie.
Quelle alliance pour Les Républicains ?
Enfin, en ce qui concerne les alliances, la droite est obligée d’anticiper. Car l’heure de vérité risque de sonner plus tôt que prévu pour elle sur ce sujet (on pense aux municipales). Cette question est d’autant plus importante que deux causes la poussent à clarifier rapidement sa position dans ce domaine. La première tient à ce que les institutions et le mode électoral de la Cinquième république obligent les partis à passer des alliances. Cette nécessité explique, par exemple, que le RN reste toujours éloigné du pouvoir. Le second motif qui pousse la droite de gouvernement à nouer rapidement des alliances tient à son affaiblissement historique après les élections européennes de mai.
Cette question n’est pas moins ardue pour Les Républicains que les précédentes. En effet, sur ce point, les divergences en leur sein sont encore plus grandes que sur le plan idéologique. Si certains ne voient pas d’un mauvais oeil les appels du pied de Marion Maréchal en faveur d’une union des droites, en revanche, pour les autres, fidèles à la consigne du « cordon sanitaire » de jadis, cette éventualité fait office de ligne rouge à ne pas franchir. La question des alliances s’avère grosse de dissensions.
Les sirènes maréchalistes ne sont pas les seules à troubler la reconstruction de la droite. Le cas « Macron » la travaille également, tant au niveau de son identité que sur le terrain tactique. Au-delà de la question de savoir si Macron est de droite ou pas, il reste encore à définir la bonne attitude à adopter à son égard. LREM jouera-t-il le rôle de l’UDF de Giscard ? Mais cela voudrait dire que Les Républicains sont devenus l’équivalent du RPR de Chirac. Or, c’est loin d’être le cas. Leur marge de manoeuvre reste très étroite également sur le plan électoral.
L’échec de Macron comme planche de salut ?
Les chances de renouveau de LR sont-elles suspendues à l’échec du macronisme ? Indépendamment de la contingence de sa réalisation, cette perspective n’est pas susceptible de susciter beaucoup d’enthousiasme ! On ne s’engage pas en politique avec pour motivation principale la chute de votre concurrent ! A moins de parier que le macronisme ne survive pas à Macron. Un espace politique se libérerait alors. Cependant, cette hypothèse n’exonérera pas la droite de son devoir de clarification vis-vis d’elle-même. Les aléas de la vie politique ne sont pas tout. La mauvaise chance de votre adversaire ne peut servir de prétexte pour faire l’impasse sur la définition de votre corpus idéologique !
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